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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2010-06-28 | [This text should be read in francais] | Submited by Dolcu Emilia
VIII
La clarté frappant en plein air sur le fragment d’une peau de chagrin suspendue à un clou, précisément au dessus du siège sur lequel le jeune homme était assis, il vit en se levant, un phénomène assez extraordinaire pour le surprendre. Cette peau, grande comme la fourrure d’un jeune renard projetait des rayons étincelants… Au sein de la profonde obscurité qui régnait dans le magasin, vous eussiez dit d’une petite comète… Le jeune incrédule s’approcha de ce talisman si puissant comme le malheur en s’en moquant par une phrase mentale; mais animé, cependant, par une curiosité bien légitime, il se pencha pour le regarder alternativement sous toutes les faces; et alors, il découvrit bientôt une cause naturelle à cette lucidité singulière. Les grains noirs du chagrin étaient si soigneusement polis et si merveilleusement brunis, les rayures capricieuses en étaient si propres et si nettes que, pareilles à des facettes de grenat, les aspérités de ce cuir oriental simulaient autant de petits foyers qui réfléchissaient vivement la lumière. Il démontra mathématiquement la raison de ce phénomène au vieillard qui, pour toute réponse, sourit avec malice. Ce sourire de supériorité fit croire au jeune savant qu’il était en ce moment dupe de quelque charlatanisme; et, ne voulant plus emporter une énigme de plus dans la tombe, il retourna promptement la peau comme un enfant pressé de connaître les innocents secrets de quelque nouveau jouet. - Ah! ah! s’écria-t-il, voici l’empeinte du sceau que les Orienteaux nomment le cachet de Salomon… - Vous le connaissez donc?... demanda le marchand de curiosités dont les narines laissèrent passer deux ou trois bouffées de’air qui peignirent plus d’idées que les plus énergiques paroles. - Y a-t-il au monde un homme assez simple pour croire à l’existence de cette chimère!... s’écria le jeune homme piqué d’entendre ce rire muet et plein d’amères dérisions. - Ne savez-vous pas, ajouta-t-il, que les superstitions de l’Orient ont consacré la forme mystique et les caractères mensongers de cet emblème qui représente une puissance fabuleuse? … Je ne dois pas, dans cette circonstance, être plus taxé de niaiserie, que si je parlais des Griffons, dont l’existence est en quelque sorte scientifique. - Puisque vous êtes un orientaliste, reprit le vieillard, peut-être lisez-vous cette sentence… Apportant alors la lampe près du talisman que le jeune homme tenait à l’envers, il lui fit apercevoir des caractères incrustés dans le tissu cellulaire de cette peau merveilleuse, comme s’ils eussent été produits par l’animal auquel elle avait appartenu. - J’avoue, s’écria l’inconnu, que je ne devine guère le procédé dont on se sera servi pour graver si profondément ces lettres sur la peau d’un onagre… Et, se retournant avec vivacité vers les tables chargées de curiosités, ses yeux errants parurent y chercher quelque chose. - Que voulez-vous?… demanda le vieillard. - Un instrument pour trancher le chagrin, afin de voir si les lettres y sont empreintes ou incrustées… Le vieillard lui présenta le stylet. Il le prit et tenta d’entamer la peau à l’endroit où les paroles se trouvaient écrites; mais quand il eut enlevé une légère couche du cuir, les lettres y reparurent si nettes et si conformes à celles imprimées sur la surface, qu’il crut, pendant un moment, n’en avoir rien ôté. - L’industrie du Levant a des secrets qui lui sont réellement particuliers! dit-il en regardant la sentence talismanique avec une sorte d’inquiétude. - Oui!... répondit le vieillard, il vaut mieux s’en prendre aux hommes qu’à Dieu! Les paroles mystérieuses étaient disposées de la manière suivante: Si tu me possèdes tu posséderas tout. Mais ta vie m’appartiendra. Dieu l’a voulu ainsi. Désire et tes désirs seront accomplis, mais règle tes souhaits sur ta vie. Elle est là . À chaque vouloir je décroîtrai comme tes jours. Me veux-tu? Prends. Dieu t’exaucera. - Soit! - Ah! Vous lisez constamment le sanscrit?... dit le vieillard. Vous avez été peut-étre au Bengale, en Perse?... - Non, Monsieur, répondit le jeune homme en tâtant avec une curiosité digitale cette peau symbolique, assez semblable à une feuille de métal par son peu de flexibilité. Le vieux marchand remit la lampe sur la colonne où il l’avait prise, en lançant au jeune homme un regard empreint d’une froide ironie qui semblait dire: - Il ne pense déjà plus à mourir!... |
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