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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2012-06-18 | [This text should be read in francais] |
Dans mon rêve, je passais un test de Rorschach ; vous savez ce test d’évaluation psy de type projectif, dans lequel on doit voir des choses comme un nuage ou un zeste d’amour dans une bavure de potache !
J’étais moi-même le psy, mais placé de l’autre côté du miroir, derrière la table ou sur le divan, devant une série infinie de planches de Rorschach, bien trop symétrique pour être vraiment honnêtes ! Elles étaient comme des taches de sang séché, des saletés de taches qu’il m’était proposé d’interpréter "librement " ; mais de suite, j’ai constaté que je n’étais pas libre, et que tout mon être lié de pied en cap, était hypothéqué par le passé et le présent, que mes pensées étaient elles-mêmes tout erronées comme assujetties à tous mes acquis et à ma propre hérédité de pauvre primate. J’étais trop plein d’images comme un ivrogne est plein d’alcool, trop rempli de préjugés et de clichés comme une outre débordante., mais je ne suis qu’un pauvre mammifère ! Une épée de Damoclès planait au-dessus de ma tête, j’ai alors compris, tout exaspéré, que mes réponses ne serviraient que mon propre jugement, comme une vis qui tourne folle. Les réponses sont toujours ailleurs, au-delà des pensées, des taches comme au-delà des neuf points, hors cadre ! « Quelque chose s'était cassé dans mon moteur » écrit Saint-Exupéry dans son Petit Prince. Et pour moi comme pour lui, tout était comme une question de vie ou de mort. Il avait à peine de l'eau à boire pour huit jours, et de mon côté, j’avais à peine trente secondes pour interpréter toutes ces taches. Alors, plus isolé qu'un naufragé sur le radeau de la Méduse, au milieu d’un Océan de besogne, j’ai entendu une voix dans mon dos ou dans mon propre désert, qui me disait « C’est la tache originelle ! Un monstrueux pâté d’humaniture, c’est un chemin d’effacement qu’il te faut opérer, avec la gomme à vanité et surtout beaucoup d’humilité. » Et dans ces taches de sang, il ma fallait discerner une tâche de sens. Au premier regard, j'y ai vu mille petits bonshommes blessés, la bouche tordue et les yeux grands ouverts, ils hurlaient à la mort en me considérant avec gravité tout en criant leur souffrance sans fond. Ils étaient moi et j’étais eux, et nous étions plongés les uns et les autres dans toute l’horreur des conflits mondiaux. Lorsque j'avais six ans, en rêve ou en réalité, qu’importe ! j'ai vu la guerre, les chairs meurtries couvertes de sang, et il n’y avait pas dans ces images la moindre trace d’humanité ou d’amour, pas de tendresse, rien que de la détresse et de l’hostilité entre les images et les mots, les clichés et les phrases, en ce livre abominable tellement réaliste que l’auteur l’avait nommé « Histoire vécue ». Ça ressemblait à un enfer, me dis-je, où les loups se nourrissaient de leur propre chair. On disait même dans ce livre : « L’homme est un loup pour l’homme, il est son pire ennemi, une proie fragile dont il est lui-même le grand prédateur. » Alors, comme le Petit Prince, j'ai beaucoup réfléchi depuis mes six ans aux aventures de ce soi-disant Homo Sapiens Sapiens. Car les enfants ont toujours besoin d'explications et d’un temps de réflexion ; et la guerre, ça n'améliore pas leur opinion sur l’humanité ! Les « grandes personnes » se battent comme des chiens et les enfants se battent comme des hommes, tels pères tels fils, de génération en génération. Et les chiens, je les ai vues de très près, avec leurs griffes et leurs dents tirées. Car entouré de gens très sérieux et très pieux, j'ai aussi beaucoup vécu chez les grandes personnes, tout en constatant qu’un homme raisonnable ou un peu lucide, c’est aussi rare qu’une cathédrale engloutie sur la planète Mars! (...) Je me souviens avoir posé ainsi moi-même la question ! « S'il te plaît père, explique-moi la guerre ! » La guerre ? Ce sont des jeux de maux comme tu connais les jeux de dés ; la souffrance des peuples comme tu connais la douleur d’un genou écorché ; c’est le tourment des hommes désenchantés, des mères désenfantés et des épouses endeuillées comme tu connais l’angoisse de l’absence, le désarroi à la gorge et la peur au ventre. C’est entre la vie et la mort, un terrible chemin de déchirures. Mes éclaircissements sont-ils vraiment compréhensifs pour toi Benjamin ? « Pourtant père, ce que je distingues, n’est-ce pas le murmure d’une rivière, tu sais, là où viennent boire les biches et se baigner les enfants ? » Nenni Benjamin ! On pourrait le croire, mais ce que tu entends, c’est le cri d’une mère qui cherche son petit dans les gravats d’un bâtiment, ce sont les hurlements des bébés crieurs qui se meurent de soif, aspirent à trouver un sein et deux bras pour réchauffer leur petit corps malade. « Mais pourtant père j’entends bien le chant des arbres ! » Désolé pour toi mon cœur ! Moi aussi j’aurais bien aimé que ce soit la douce chanson du vent dans les cerisiers en fleurs, mais malheureusement ce que nous entendons, toi et moi, c’est l’haleine puante des armes qui crachent leur venin. Même la puce à l’oreille le dit tout bas, les guerres comme les saignées les plus purgatives n’ont jamais protégé personne, et les sacrifices sanglants n’ont jamais sauvé la moindre puce ! Ils remontent l’une et l’autre aux temps immémoriaux où l’on croyant encore que la rébellion et le sang étaient la vie, qu’il véhiculait les âmes comme des bateaux sur l’eau ; et que le sang offert à la terre et aux dieux apporterait aux vivants quelques mannes célestes bien méritées. Devant comme derrière nous, à vol d’oiseau les bombes volent bas, elles emportent la chair avec le cri du souffle, l’odeur des nerfs à vif et des muscles écorchés. La bête, l’animal humain restent invasifs ; partout, le non-sens gicle comme une sanglante réalité, il éclabousse la surface de l’eau et contamine jusqu’au ciel intérieur. « C’est un coup de tonnerre ? » questionne l’enfant. Non mon ange ! C’est un drame, un coup de théâtre, c'est le son noir du canon qui gronde encore, lâchant son feu sur la ville en émoi – C’est la bêtise des bêtes quand elles se croient des hommes – c’est l’erreur des pensées quand elles se laissent emporter par les émotions. C’est la faim de vengeance qui fait trembler le monde ; la soif de pouvoir qui vient se désaltérer jusqu’en nos regards. C’est l’avidité des uns quand elle rencontre l’impatience des autres. C’est la tristesse qui tire de gauche à droite comme en politique, une cicatrice vive. C’est la détresse croisant la haine à chaque coin de rue ; c’est la jalousie semant la terreur, la honte toute nue traversant la campagne, et le remords tirant le remords, et la jouissance prenant son plaisir à coup de fusil, sans pitié aucune... C’est la colère et la déception quand elles se font représailles, brutalité, barbarie, atrocité, des mots, rien que des maux et des sentiments bien animaux, une traînée de poudre suivie d’une traînée de sang comme un châtiment qui viendrait d’en haut. C’est le dégoût d’aujourd’hui qui vient remplacer l’admiration d’hier, l’idolâtrie qui prend chair pour prendre la vie, c’est l’accablement que tu entends et l’abrutissement des bêtes que tu vois ; c’est l’abjection la plus infecte et l’abomination la plus bestiale. Les yeux exorbités ou le regard cavé, c’est la guerre au-dehors, et c’est la guerre au-dedans ; l’homme vertical ne tient plus debout, car l’Homme véritable n’est pas encore là ! C'est lui qui plus tard, digne descendant de Macduff détruira la bête immonde, le tyran sanguinaire, le dictateur qui sommeille en chacun de nous ! Afin que mature l'humaniture qui se répand partout. Coup de théâtre, oui, car seul celui qui n'est pas né d'une femme sortira de nos laboratoires pour arrêter Macbeth dans sa folie destructrice. Il est l'Elu, celui que prophétisent les vrais sages et que fabriquent dans leur labo des 3IT (1) les nouveaux sorciers dans le domaine de la biotechnologie. (...) C’est le choc des cultures contre celui des images, le pot du faire contre la peau de chair, le combat des insectes contre les Titans. Pris entre les canons de la certitude et les feux de l’incertitude, certains revendiquent la victoire, d’autres aspirent à la vérité, mais nul ne sait plus à quelle arme se vouer, à quel discours s’associer, à quelle tendance se laisser aller. Pour quelques pourcentages de nantis, de démagogues et de méchants, la masse des bêtes torturées, défigurées, avance, troupeau servile dans un sens giratoire, à l'inverse des aiguilles du temps, bétail écervelé, faisant la joie des armateurs et le jeu des hypocrites. Sur un tempo chaotique, c’est l’incarnation du mal qui se joue des tambours, ce sont les mesures répressives qui font la musique, tam, tamtam, sur le rythme des bottes, le pas des soldats prend le pas sur la palpitation des pouls, seul un bain de bon sens pourrait arrêter cette ablution de sang. Seul l’Homme qui vient sera l’élu des corps et des cœurs ! Pauvres bêtes ! Ce n’est pas l’orage ni les pluies diluviennes que tu entends mon fils, c’est l’écho crissant des armes blanches qui viennent égorger et couper en morceau ce qui reste d’espérance ; c’est une expédition punitive dans la nuit quand tu dors, une incursion d’ignobles bêtes qui viennent émasculer et éventrer devant nos écrans plats, dans les chambres à coucher et les cuisines équipées ; c’est l’invasion qui marche bon pas, sans trêve et sans discernement dans la TV comme en dehors de chez nous ! C’est la superstition qui fait ses ravages et les religions qui font des dégâts ; c’est le grand Inquisiteur qui vient sur son cheval de feu ; c’est la folie des chefs et la démence des foules ; C’est le massacre des Innocents qui se répète de génération en génération. Ce que tu perçois, fils, entre deux cris de femme que l’on viole et d’enfants qu’on assassine, c’est le hurlement des cris de guerre, le chant des bêtes fauves qui se déchirent pour quelques territoires. C’est la mocheté du monde et notre bête condition d’êtres errants à la recherche d’un homme sage ou d’un dieu qui viendraient par magie nous transformer en hommes. Entre une apesanteur angélique et une pesanteur de diable, entre le grégarisme et l’humanitaire, notre cœur balance, comme le pendule de Foucault, il cherche son centre de gravité. C’est la vulgarité à l’état brut, le viol à l’état cru, et l’infamie toute nette ; la veulerie des lâches et la vanité des forts. C’est dans les académies, les amphithéâtres et les palais, la petitesse des bêtes qui se prennent pour des sages et des êtres d’exception ; c’est la prétention à l’état pur qui crache sur la masse des affligés ; c’est la tromperie qui se rit de notre espérance. C’est encore le triomphalisme de la technologie, et le tableau de chasse des grands de ce monde ; c’est partout la trahison des institutions et des églises ; en tous lieux l’intolérance fait son tollé, la suspicion se fait préjugés et les clichés se meuvent en méfiance ; c’est une couche de discours qui fait couche de vernis ; c’est la soumission des uns face au sarcasme des autres, c’est la rivalité des frères de sang et le sang même des révoltés qui coule dans nos veines ; c’est un ressentiment qui gronde dans les entrailles de la Terre, la résignation, la fuite éperdue, la rancœur ou la rancune, l’amertume qui poursuit l’injustice, c’est la dictature du savoir qui chevauche la malveillance de ceux qui savent tout et ont tout ; c’est partout la désolation, de déni et le dédain ; c’est partout autour de nous la discorde qui frise la confusion, le malaise et le mal-être les plus totaux au pays des singes dénudés. C’est tout ça que tu perçois fils dans la fumée noire qui monte des ruines carbonisées de Babel. Ce n’est point le soleil qui flamboie au-dessus des maisons que nous voyons, mais la ville qui rougeoie à force de déraison ; ce n’est pas un feu de joie ou un brasier pour la Saint-Jean, c’est l’odeur des corps qui brûlent pour éclairer les fantômes jusqu’en enfer, et c’est brûlant comme les flammes qui sèment le doute et déversent la peur. Même les artères des grandes villes sont exsangues de sens ! Pas de veine ! Pour tous les êtres de chair et d’esprit qui se promènent en rue, en léchant les vitrines. Partout les étals débordent de produits toxiques à consommer sur le champ. C’est la nausée de consommation qui monte comme une marée sans fin, un ras de marée comme un ras de nausée. « Où trouve-t-on de la nourriture pour l’Homme ? », interroge l’enfant, « Je ne vois » dit-il, « Que des choses pour survivre ! » Oui, mon fils, tu as raison, tu ne verras ici que des baxters pour subsister, surnager à la surface de l’existence, pour supporter la frustration, pour apaiser le corps comme des drogues plus ou moins dures pour aborder la vie, rester en surface, satisfaire nos mœurs de bétail, remplir nos yeux d’images anesthésiantes et nos comptes d’argent pour occuper nos sens. », « Mais où sont donc les graines à aimer, les germes de la tendresse, dont tu me parlais hier encore, ces gestes gratuits qui font tout le plaisir ? Où sont-ils, père, ces mains ouvertes, ces grands sourires, ces oreilles attentives et ces regards de compassion ? Où peut-on trouver l’accueil et les bras qui s’ouvrent quand pénètre l’étranger ? Dis-moi père, pourquoi depuis Diogène l’Homme est si absent ? » Mon fils, les fruits de l’humilité sont rares en ce monde, et les légumes qu’il faut contempler pour grandir en sagesse sont absents de ce marchée ? Tu ne trouveras ici que des choses qui aident à rester debout comme des animaux de trait, des produits qui entretiennent nos besoins de bêtes avides, maintiennent nos croyances à l’état le plus brut ; des objets de prédations pour prédateurs, des aliments qui ruinent l’âme et font rouiller le cœur. Tu ne trouveras pas ici autre chose que des technologies de pointe pour nous rendre plus beaux, plus grands, plus forts, et toujours plus dépendants de la meute aux abois. Car saches-le, nous somme au royaume des mirages d’or et des illusions de diamant ! « Pourquoi tant de sang » ? Mais qui est le père, qui est l'enfant et qui se cache derrière le narrateur ? « C’est à cause du non-sens », répondis-je, en m’agenouillant devant mon maître de 6 ans. Conscient que cette notion de « non-sens » n’était pas sensée pour mon propre maître. Convulsion après convulsion, dans les quatre directions, l’horizon est sanglant comme un coucher de sommeil, la masse de la Terre semble vouloir dormir, se reposer un peu, peut-être même pour rêver de paix et de silence. Tu vois, dans ton cœur, entre ciel et terre, les quatre vivants eux-mêmes saignent devant l’astre terrestre. Prenant ses crayons de couleur, l’enfant dessine jusqu’à ce que ses yeux se ferment. Alors fermant sa boîte de crayons, je me tourne vers son bureau, et j’en profite pour prendre mon stylo à bille et écrire quelques notes, pour compléter ma propre histoire vécue. Mots à maux, en cette médiation d’encre noire, l’écriture s’épanche, elle s’écrit au journal jusqu’au bout de la journée, comme à l’aube d’une nuit tranquille, comme dans une exsanguino-transfusion, l’encre comme la peinture donnent la paix ! Le temps avance doucement ; l’aiguille marque l’heure juste, elle est comme la vie qui entre « le sens » et « le sang », peut croître à petits pas de danseuses fragiles, en équilibre instable sur le fil des ans, comme ma plume suit son chemin sur sa ligne invisible. Mon encre laisse sa trace humide et grasse, comme ruissellent les larmes. Mais malgré le cri des mères, des prophètes et des poètes, les dieux ne peuvent agir là où le Sapiens réagit au lieu de croître ! Et les dieux ne peuvent aimer que là où l’Homme s’épanche et vient ! Nous avons tous une énorme part de responsabilité pour sortir du marasme, pour quitter ces terres animales et devenir davantage des Humains dignes de ce nom à venir. Il y a vingt-six ans naissait le premier bébé éprouvette. Mais comme la calligraphie qui s’étale, comme un chemin de vie ou d’écriture qui fait son pèlerinage, la route est encore longue ! À côté de moi l’enfant sommeille... Mais demain est un autre jour ! Sherbrooke, juillet 2003. (1) Le 3IT Institut Interdisciplinaire d'Innovation Technologique de l'Université de Sherbrooke. |
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