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Origami ou les ourlets dépliés à vif
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« Mes ourlets dépliés à vif de chair & de sang » d’IsaBercée

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by [Reumond ]

2010-06-21  | [This text should be read in francais]    | 



« Ta peau de jeune ivoire est rose et blanche et jaune un peu » Paul Verlaine, Chansons pour elle.








ORIGAMI OU LES OURLETS DÉPLIES A VIF

Une présentation de « Mes ourlets dépliés à vif de chair & de sang » une oeuvre d’IsaBercée.




Je n’en ai jamais douté ! Les « ourlets dépliés à vif » ressemblent à s’y méprendre à des métaphores de velours !

Au commencement, la page était-elle blanche, vraiment ? Vide et toute virginale, comme « Azédine danse…, vue de dos » pour ne montrer que la partie visible de l’Iceberg, car le réel toujours se cache en grande partie derrière les gros nuages de l’inconnaissance !

Les relations entre l’écrit et l’image, le derme et le terme s’accomplissent ensemble : l’ acte d’écrire est toujours la rencontre de deux être, deux mouvement de vie et de mort, ordre et désordre, rite et rythme, corps fragmentés et paroles éclatées, rature et sutures, marge et nudité …, là où seules les métaphores semblent pouvoir dialoguer avec les questions, et où les réponses reste vagues, se perdant dans la nuit des corps.

Au commencement était le papier et la peau était au commencement ; le rêve aussi certainement était là, et le plaisir avec, mais quel était vraiment le dessin du dessein, le jet du projet sur le mur de la grotte, le pictogramme qui disait déjà : « L’union fait la force », « aimez-vous les uns les autres », « je pense, donc je suis » … ?

Dans sa solitude de papier, « L’homme aux murmures » griffe l’espace avec ses ongles, il graphe : seules les métaphores tracent leurs longs sillages d’encres dans le Réel invisible ; la danse des signes dit le pluriel et la multitude de nos petites réalités. Face à face au néant, nous sommes seuls ! Quand l’imaginaire se fait creux résonnant, alors la métaphore se fait cymbale triomphante !

Quel était le sens des mots du corps, celui des maux, le sens du sang quand le trait du désir et la ligne du plaisir se perdaient en questions à l’horizon ?

Quelle était la couleur à savourer la forme ? « Ce bleu qui rend aphone » ? La configuration des lieux ? Quel était, au commencement la quête ? Quelle était la respiration profonde de l’arbre à esprits, ceux qui accompagnaient le geste, et marquaient les regards, ces yeux d’enfants qui suivaient les mouvements de la lune et du soleil sur la peau des ancêtres ?

Comment parcourir le texte comme l’œil parcoure le corps ? Comment s’y retrouver dans l’entrebâillement des couleurs et des membres entremêlés, dans tout l’empâtement des muscles, les bourrelets de la graisse de modèles en pleine métamorphose ? Comment devenir plus humain quand on a que des os et des pointes sèches pour écrire l’avenir ?

Couleurs, textes, trait pour trait à croquer, les pages d’un livre font-elles corps avec le lecteur, avec ses exigences particulières, avec l’empreinte de ses mains noueuses, celles qui prennent à plein nœud les envies, et à pleine vie les jeux d’impossibles enjeux ?

Comme « Cavatine au terme de soi », état aux limites « extrêmes », il nous faut entrer dans la danse du toucher et dans la chorégraphie du sacré.

La texture des scripts et la sensation dans les doigts, l’aspect des feuillets comme méninges à vif…, couleurs, textes, traits portrait …, les toiles du peintre font-elles chair avec le voyeur ? Avec cette joie de faire rythme et mimétisme avec la nature ?

Depuis toujours, la calligraphie des âmes, au pas des mots, de long en large et de haut en bas, se dévoile pour révéler le meilleur de l’humanité à venir.

Entre cerveaux reptilien, limbique et cortex, entre pictogramme, sigillaire et cursive, l’écriture se déroule, se réalise…, peau fripée, ridée par l’épreuve du temps, lèvres mâchées comme le papier du même nom, quarante-sept fois langues traçantes, stylets égratignant, à partir des mêmes sources évaporées qui s’offrent aux nuages les plus gris.

Les Musées se vident d’eux-mêmes, intestins dépeuplés, pour que la rue devienne elle-même la grande galerie de La Galéjade Humaine.

Sous l’écorce de la peau de chacun, il y a un profond désir à fleur de nerfs, et la peur aussi, enfoncée, qui tressaille au ventre durci ; il y a les souvenirs, vieux de quelques millions d’années d’évolution, de conflits qui prennent formes de graphies et de tags sur les murs de la ville.

Des « Princesses céruléennes » traversent les piétonniers, de leurs lieux de travail aux magasins, elles déambulent, dans la lumière de juin, leurs ombres fantomatiques se fond calligraphiques.

Comme la peau à la paume s’offre, et l’œuvre aux regards, ainsi les tulles et les dentelles s’exhibent aux mains baladeuses. Dans la nuit la plus noire, le tic tac des pendules lapide le tempo, tout comme la pluie et le soleil se donnent à la terre - papier froissé, terre - papier crépon crépu, à l’orée des feuilles, tout est caresses, poils dans le sens des corps, tout est donné ou à donner.

Mettre le doigt sur le nerf et la plume sur la corde raide. Accroche-cœur des nodosités de feuille, dans l’enchevêtrement des cellules de la peau et les grains du vélin cru.

Aux sentiers impraticables de l’être, pleines trames, pleines rames dans les vapeurs tièdes de l’esprit, les corps sont des casse-tête chinois, de la tête aux pieds, de l’armature des chairs jusqu’aux structures de l’âme.

Toiles ou papier, marbre ou peau, corps-accord pour des accordailles de diamant, des noces jubilatoires inoubliables.

« Les ourlets dépliés » d’un trait … comme « Le soleil caresse la peau jusqu’à la salive » ; pâte à papier parchemin, Ingres, Arches …, mi-teinte et passe-partout, trompe l’œil …, les papiers ne compliquent pas la tâche, ils font taches ! Bavures et indices d’une présence « de chair et de sang ».

Les papiers à peindre comme les toiles à éclabousser ont chaud au cœur quand dansent les mains, quand l’idée se métamorphose en approche tactile, sensorielle et motrice.

Alors, les mots eux-mêmes se cambrent comme traits et se déhanchent sur la ligne, dedans, dehors … ; les creux épousent les saillies, la main hésitante se traduit en corps accords, encore, dans la vague des replis.

Repos du guerrier, Lana, Canson, Caran d’Ache, sont lits pour coucher l’encre et allonger le corps.

Les mains débarquent en des terres encore vierges de cri, inconnue à « connaître », frôlant frileusement le Fabriano, crème de papier, l’espace bichromaté semble se fondre au temps, celui d’une épreuve, d’un cliché, d’un regard échangé, le temps d’une tendre caresse au bord de la marge sauvage.

Comme les doigts fébriles et les gros pinceaux, créatures poilues venues du Neandertal, la plume et le carbone des crayons sondent les replis de l’être, les tournures et les entournures de la forme, à ras bord de sensations tièdes.

Au pays de la toile, territoire de la mémoire millimétrée, quadrillée, à bords frangés, à grains toilés comme des grains de beauté, marbrés comme taches de vin, nervuré, filigrané comme la pulpe des lèvres, tiré comme des cicatrices dans la peau blanche … Papier - chair pour moi - peau, havane ou beige, relié de toute part pour affronter la pesanteur du trait et défier tous les interstices, les ombres les plus claires et le clair-obscur le plus subtil de l’entre-corps.

Cordon dehors, cordons dedans, la ligne des tissus se fait garniture des chairs, couture à ras bords et bordure à border; on peut ourler les peaux comme on hurle les mots et plier le papier cru comme se plie l’humanité devant la nature, rien ne résiste au cri !

Hommes et femmes de papier, l’art du pliage d’âge en âge génère l’amour, hommes et femmes de papier découpé, l’art « à vif de chair & de sang » se donne comme métaphore pour explorer l’inconnu.

Roland REUMOND

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