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De l’Anfractuosité de l’âme humaine
article [ ]

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by [Reumond ]

2024-04-05  | [This text should be read in francais]    | 






Pourquoi cette éternelle infructuosité en notre profonde intériorité ?

Pourquoi en chacune et en chacun de nous cette chambre d’échos, toute pleine de réminiscences et de réverbérations, ne porte-t-elle pas plus de beaux fruits ?

Tout comme le vide quantique est un trop-plein de conscience et d’informations, l’homo sapiens est lui-même un manque d’être ou un manque à naître, comme un vide béant, un trop-plein de questions sans réponse, un abîme sans fond, tel un espace qui donne la nausée et le vertige…

C’est ainsi qu’au plus creux de nos esprits, au plus profond de nos corps, au plus concave de nos cœurs, au plus sinueux des circonvolutions de nos espaces-tempes, là où notre cortex forme les mots aux volutes des maux. Au plus circonflexe de nos espaces-temples, là où nos croyances sont comme des certitudes de charbonnier ou de savant, s’épand un grand Vide, un Manque, une Béance créatrice, là même où les Arts et la littérature en sont eux-mêmes l’expression et la description. (…)

Il faut dire ou souligner que l’antériorité et l’intériorité des choses m’ont toujours attirée et fascinée, de sorte que très tôt, je les intériorisais comme on retient un visage ou un paysage.

Enfant, je passais des heures à visiter les sous-bois, tout au long de la Dhuys, et ce qui restait de l'ancienne Forêt le Bondy.

Explorateur en culotte courte, j’explorais dangereusement les caves du château de Maison-Rouge et toutes les carrières environnantes, celle de la Fosse-Maussoin à Clichy-sous-Bois, jusqu’à celles de Gagny, de Montfermeil , jusqu’à explorer durant les grandes vacances les anciennes carrières de Fontaine Henry transformées depuis en champignonnières.

C’est ainsi qu’en grandissant, j’ai découvert Darwin à douze ans (1); et à l’adolescence l'envers et le dedans des choses, celui de l’âme humaine et des esprits, comme la caverne de Platon et les grands mystères de la vie.

C’est alors que j’ai commencé à regarder profondément les gens dans les yeux, puis de plus en plus profondément dans le cœur, cherchant l’Homme comme Diogène, et explorant jusqu’aux trous de mémoire, jusqu’aux espaces intérieurs les plus encombrés de peurs et de souffrances; des intérieurs les plus confortables jusqu'aux intérieurs les plus sujets aux dénis…

Au point de devenir, bien des années plus tard accompagnateur et psychothérapeute, comme d’autres passionnés deviennent archéologue ou spéléologue, allant ainsi jusqu’à me perdre moi-même dans les méandres de la conscience, dans ceux du cerveau comme dans les labyrinthes du cœur d'hommes et de femmes en recherche comme en souffrance.

J’ai ainsi sondé jusqu’au bout de mes propres limites des puits sans fond, et des fonds sans nom ; visitant les dédales et les rêves les plus intimes de la condition humaine, jusqu’aux plus ultimes failles de l’humanité, laissant les apparences et l’extériorité aux matérialistes de tous poils.

Me posant sans cesse la même question :
Pourquoi cette si riche "intériorité" ne porte-t-elle pas plus de fruit ?

J’ai pourtant visité l’intériorité de certaines personnes plus belle que les grottes de Chauvet ; j’ai pu voir de mes propres vœux et entendre derrière mes acouphènes des corps hantés par des fantômes et des angoisses sans nom ; et dans les cavités les plus obscures, comme au bout de la nuit, là où parfois le bout des tunnels se fait des plus lumineux, j’ai vu des anges ressusciter des vies et guérir les plaies les plus sanguinolentes.

Parcourant avec mes patients les cavités les plus naturelles jusqu’aux cavernes les plus surnaturelles, tel un troglodyte aux falaises de l’esprit, en explorateur de forêt topicales, en chercheur de sens comme en prospecteur de registres. (2)

Entre les dedans et les dehors, les entre-deux et les ailleurs, je n’ai jamais cessé de parcourir mille topologies en forme de nœuds et de ruban de Möbius, revenant sans arrêt sur mes pas comme on revient à la vie.

Je croyais connaître par cœur nos corps caverneux et toutes les profondeurs, hauteurs, largeurs, épaisseurs de l’homo sapiennité ; et, entre autres tous les antres entre le Ciel et la Terre; je pensais même avoir vu les tanières les plus cachées et les repaires les plus hasardeux. Tout comme j’imaginais avoir prié dans tous les ermitages et temples du monde et y avoir pratiqué les retraites les plus spirituelles ; je croyais honnêtement avoir visité les cavernes les plus concaves et les tavernes les plus sordides ; et pourtant, pourtant, cette profonde intériorité toujours m’échappe.


(1) Cadeau de ma grand-tante Marcelle pour ma grande communion et ma confirmation.
(2) En référence aux topiques de S. Freud et aux registres de J. Lacan

Des anfractuosités de l’âme humaine (extrait)

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