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De la dissolution de la démocratie dans la ploutocratie
personals [ ]
Dégoût et désarroi d'un électeur - PARTIE 1

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by [triton ]

2025-05-04  | [This text should be read in francais]    | 



Peu avant l’élection de Donald Trump, j’ai commencé, comme pour tenter d’ordonner mes pensées, à écrire mes sentiments et inquiétudes sur l’évolution de la politique américaine. J’étais avant tout irrité par la complaisance de Donald Trump envers la Russie, qui confirmait les espoirs que Poutine avait placés en l’élection américaine, et aussi par la passivité du peuple américain, qui cautionnait l’émergence d’un nationalisme porté le fondamentalisme religieux et par la cupidité d’un capitalisme avide, dénué de toute dignité et de toute humanité. Et également porté par une bonne dose de stupidité et d’aveuglement… Jusqu’à mi-février, le texte s’est nourri, un peu au jour le jour, de ma colère et de mon dégoût, comme un exutoire où je déversais mon ressenti des actualités. Je pensais n’en rien faire mais les premiers mois de l’année 2025 ont tellement confirmé mes craintes que je me suis décidé à le mettre en ligne, pour partage à qui veut… Le texte est long et, malgré mon soin pour essayer de le structurer et le rendre plus agréable à lire, il reste plein de digressions et de redondances. Vue sa longueur excessive, je le découperai en morceaux pour publication sur le site, sans chercher à l’actualiser des décisions les plus récentes de Donald Trump et des réactions de nos dirigeants. Je ne parlerai donc pas – ou très peu - des taxes douanières, ni des manipulations boursières à la limite de la malversation et du conflit d’intérêt permanent, ni du rapport de forces instauré par les USA avec le reste du monde. Je ne parlerai pas non plus de ses dernières tirades et insultes sur les dirigeants (je cite) qui l’appellent affolés, et « prêts à lui lécher le c… », en le suppliant d’un accord. Je ne parlerai pas non plus de ses tweets ridicules, comme celui fait début mai il se représente en nouveau Pape, fier comme un gamin posant dans son costume de Superman ! Peu importe au fond car toutes ces déclarations et postures ne font que refléter ce que l’on sait déjà depuis des années, et notamment sa volonté maintes fois affirmée (et là aussi ce sont ses propres mots) d’être « craint » et « admiré », obsession répétée ad nauseam avec une insistance qui confine au délire psychotique. Délire visiblement très contagieux, puisqu’il a contaminé un pays tout entier et menace désormais le monde !

Un peu de lecture…

Des décombres du capitalisme égoïste, sortirait cette fleur de l’histoire, la Fraternité des Hommes. Au lieu de quoi, aussi consternant pour nous qui regardons en arrière que pour ceux qui vivaient à cette époque, le capitalisme, pourri jusqu’à l’os, accoucha de ce monstrueux rejeton, l’Oligarchie.
(Jack London – Le talon de fer)

En 1908, dans l’un de ses rares romans d’anticipation intitulé « Le talon de fer », Jack London, écrivain américain dont les convictions socialistes s’enracinaient dans son expérience personnelle de la misère humaine, décrivit, avec des accents parfois étonnamment prophétiques, l’avènement d’un régime capitaliste totalitaire aux USA, étendant son hégémonie sur la planète et écrasant (d’où le titre du livre) toute opposition, tant intérieure qu’extérieure. Pure imagination de romancier ? Peut-être, mais les intuitions de Jack London ne doivent pas être balayées trop vite car elles sont étonnantes de justesse. Ainsi, il imagina une révolte socialiste en 1917, réprimée dans le sang (mais qu’il situa à Chicago, aux USA, et non à Saint-Pétersbourg) et une guerre mondiale opposant les USA et l’Allemagne (que London considérait être la seule puissance industrielle capable de rivaliser), déclenchée après une attaque de la marine allemande contre la base américaine d’Hawaï, attaque habilement provoquée par les USA pour disposer d’un prétexte lui permettant d’écraser l’Allemagne au nom de ses intérêts supérieurs !

Et, de fait, l’Oligarchie plaida qu’elle avait agi dans l’intérêt du peuple américain, en chassant du marché mondial une rivale abhorrée.
(Jack London – Le talon de fer)

Désarroi d’un électeur
Depuis plusieurs années, dans le monde dit « occidental », le fonctionnement normal des démocraties semble enrayé par une crise de croissance. Tout se passe comme si la démocratie n’était plus capable que de proposer aux électeurs de choisir leurs représentants parmi des personnalités politiques globalement indignes ou incompétentes, inaptes à gérer les nombreux défis – certes complexes – issus des tensions géopolitiques et des foyers de guerres et de crises (toujours nombreux dans un monde post guerre froide que les USA et l’Europe ont échoué à réguler à travers la promotion des valeurs démocratiques, la diffusion des valeurs du libéralisme et la mondialisation des échanges commerciaux), des mutations technologiques majeures (qui transforment en profondeur les organisations sociales et les comportements individuels, et accélèrent/amplifient également la mondialisation de l’économie) et des bouleversements environnementaux provoqués par l’impact des activités humaines sur les grands équilibres planétaires (dérèglement climatique, pollution massive des airs, des océans et des terres, effondrement de la biodiversité, etc.), dont nous ne mesurons pas encore pleinement tous les effets. Alors que tout laisse croire que nous vivons une période cruciale, qui requière des politiques ambitieuses et concrètes capables de s’inscrire à la fois dans le court et le long terme, nos modes démocratiques de gouvernance soit s’enlisent dans des querelles stériles de personnes et de partis, où l’intérêt général et le bien commun sont systématiquement oubliés, soit font émerger des suffrages électoraux le pire des « élites » politiques qui ont la prétention de représenter le peuple… En effet, à quoi avons-nous assisté en cette année 2024 qui vient de s’achever ? Aux USA, un long et pénible duel de campagne présidentielle, qui n’aurait jamais dû exister entre deux vieillards, a opposé d’un côté le président sortant, un vieil homme à la démarche hésitante, dont la parole parfois s’égarait en lapsus et trous de mémoire et qu’il fallut remplacer au dernier moment par sa co-présidente quand il devint évident qu’il ne tiendrait pas jusqu’au bout, et de l’autre côté un milliardaire hystérique et mégalomane, accumulant les procès et les obscénités, mais finalement vainqueur sur la promesse, avec son pote Elon (« le plus grand capitaliste du monde, un mec super ! »), de faire prospérer comme jamais l’entreprise USA, d’en chasser les étrangers qui la parasitent et de faire ruisseler les dollars dans la poche des vrais Américains, comme l’avènement d’un nouvel âge d’or de la consommation. Sans même attendre d’être investi, il afficha ses ambitions de patron vorace envers la concurrence et lança ses propositions d’OPA plus ou moins « inamicales » sur tous les pays ou territoires voisins (Canada, Groenland, Panama…), sans oublier son chantage de soutien à l’Ukraine en échange d’une prise de contrôle sur les richesses minières du pays… Que Trump ou Biden (puis Harris) ait gagné, peu importe au fond : n’était-il déjà pas profondément malsain de les voir s’affronter, et que les USA, première démocratie et première puissance mondiale, n’ait pas été capable de faire émerger des candidats à la hauteur d’enjeux dépassant les questions de frontières et de pouvoir d’achat ? Plus près de nous, en Roumanie, un peu comme Javier Milei en Argentine fin 2023, le premier tour de l’élection présidentielle organisée en décembre 2024 a vu surgir en tête un candidat quasi-inconnu, auquel personne ou presque ne prêtait attention jusqu’à ce qu’une campagne généreusement financée depuis l’étranger, habilement orchestrée et massivement relayée (notamment sur « tiktok ») lui donne un écho inattendu ; le résultat du dépouillement suscita ensuite une vague de protestations mais aussi d’excuses de la part de celles et ceux qui découvrirent, mais trop tard, que l’évangéliste débonnaire et modeste, à la voix douce et posée, pour lequel ils avaient voté en toute méconnaissance, ne cachait pas sa sympathie pour Ion Antonescu et son régime fascisant, et qu’il détenait un patrimoine sans rapport avec l’humilité qu’il affichait. La France est-elle mieux lotie ? Guère mieux… Outre le spectacle permanent des débats, invectives et insultes entre le gouvernement et le Parlement, où la plupart se vautrent dans le clientélisme et le carriérisme – et aussi parfois dans l’incompétence -, la perspective de plus en plus probable d’un face à face, si ardemment désiré par les deux parties extrêmes de l’éventail politique, entre Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen n’est pas de nature à rassurer… Si, comme l’a énoncé Aristote, le but de la politique est de créer et renforcer l’amitié entre les membres de la cité, alors nos politiques ont tous lamentablement échoué…

En fait, comme beaucoup de monde, je ressens désarroi et colère lorsque je suis appelé à prendre le chemin des urnes. Alors que les journalistes et autres commentateurs autorisés ne cessent de ressasser les enjeux de « l’incarnation » et de la crise de fonctionnement des démocraties représentatives, force m’est de constater que le bulletin que je glisserai dans l’enveloppe à la prochaine élection ne sera pour moi que l’acquittement d’une corvée par devoir civique, au mieux un pis-aller visant le moins mauvais des choix entre tous les mauvais choix possibles… Depuis des années, je vote avec moins de moins d’entrain, sans adhésion à aucun projet, ou plutôt sans adhésion à aucune personnalité politique, puisque toutes nos personnalités politiques, en faisant de l’élection à venir l’objectif ultime de leur projet politique, n’ont en fait d’autre projet qu’elles-mêmes. J’ai pleinement pris conscience de mon rejet global de la classe politique actuelle lorsque je fus sollicité par un grand institut de sondage.

En début d’année 2024, sans que je sache comment mon numéro de téléphone avait échoué dans leurs listes de contact, je fus appelé à trois reprises en quelques semaines pour donner mon avis sur des marques de jus de fruits, sur des mutuelles et complémentaires santé et sur les principales personnalités politiques françaises. Les trois sondages, en fait des enquêtes d’opinion pour évaluer les attentes des consommateurs et mesurer la popularité d’une marque, se ressemblaient étonnamment. Le plus simple des trois, mais aussi le plus remarquable par le sentiment qu’il suscita chez moi, entre irritation et surprise, porta sur mon appréciation des hommes et femmes politiques. Le procédé n’était pas très compliqué : à chaque nom, je devais préciser si mon opinion sur la personne était « très bonne » ou « bonne » ou « mauvaise » ou « très mauvaise ». Afin de m’obliger à m’engager, il n’y avait pas de réponse neutre possible : la seule possibilité d’autre réponse était « je ne connais pas la personne ». Le principe était aussi efficace que frustrant car aucune justification n’était requise (contrairement aux jus de fruits !) or il allait de soi que les motifs pour lesquels j’étais susceptible d’exprimer un avis défavorable sur Emmanuel Macron, sur Jean-Luc Mélenchon, ou sur Marine Le Pen n’étaient pas les mêmes. On me répondit de ne pas m’en inquiéter, que c’était pris en compte par ailleurs, que c’était le travail d’analystes professionnels formés à l’interprétation des sondages, etc. Même si j’en devinais la raison (sans doute pour éviter aux opérateurs de subir à longueur d’enquêtes la litanie d’insultes ou les argumentations oiseuses que peut provoquer la simple mention de certains noms), je ne fus néanmoins que moyennement rassuré de savoir que d’éminents spécialistes se considéraient plus aptes que moi à disséquer mes réponses et comprendre mes motivations, si tant est qu’ils s’en souciaient… car j’avais de plus en plus le sentiment que ce sondage politique ne différait pas de celui des jus de fruits et qu’il s’agissait d’une stricte mesure de popularité, où le nom d’une personnalité équivalait à celui d’une marque commerciale en quête du label « marque préférée des consommateurs » ! En outre, comme la liste était longue, puisque le questionnaire portait sur l’intégralité du baromètre de popularité suivi par les média nationaux, je compris, quand l’opérateur me demanda si j’avais 30-40 minutes de disponibilité à lui consacrer, que le sondage promettait d’être fastidieux… Néanmoins, j’ai accepté d’y donner suite, autant parce qu’il faut bien que des gens répondent mais un peu aussi par pitié pour l’opérateur, que je sentais être à deux doigts de me supplier de ne pas raccrocher (je plains les opérateurs de ces instituts qui consacrent leurs journées à ces enquêtes…). Au terme de cette longue et laborieuse demi-heure de questions/réponses laconiques, j’éprouvai une impression étrange : je n’avais, pendant une demi-heure, fait qu’énoncer des réponses binaires et manichéennes à une liste de noms et avais presque l’impression d’avoir rejoué la fameuse séquence du « bien / pas bien » du film « Le pari » des Inconnus… Je n’avais, mais pour des raisons très diverses, émis que des avis « mauvais » et « très mauvais », sauf pour deux ou trois noms que je ne connaissais pas et pour lesquels je ne m’étais pas exprimé. Comme si je n’adhérais plus au système politique, mes réponses reflétaient un rejet, pour des raisons allant du mépris au dégoût motivé par l’incompétence, le carriérisme et/ou l’absence flagrante de probité morale (les trois n’étant pas incompatibles). Comment, dans ces conditions, allais-je pouvoir continuer à voter ? Quelle était la valeur démocratique d’un vote limité à un pitoyable arbitrage entre des propositions et options politiques que je rejetais toutes ? Doit-on se satisfaire d’une démocratie transformée en jeu de « qui perd gagne » ?

Démocratie : un système en crise ?
A l’échelle de l’Histoire, l’avènement des démocraties est récent et donc fragile. A l’issue de la seconde guerre mondiale, la défaite des régimes totalitaires (à l’exception majeure du communisme) a consacré la supériorité du principe démocratique. Pourtant, la démocratie ne va pas de soi : elle est issue d’un long processus de rupture, qui s’est étalée sur plusieurs siècles selon trois axes définissant les principes fondateurs de la démocratie :
1/ l’avènement de l’Etat, remplaçant l’ancien pouvoir médiateur par lequel s’opérait l’assujettissement de l’ordre humain à un principe transcendant (ce que Marcel Gauchet a qualifié de « sortie de l’âge des religions ») ;
2/ l’avènement du droit des individus, fondé sur les principes d’un contrat social qui érige l’égalité et le libre accord des personnes en seuls principes de légitimité ;
3/ le renversement de la perspective historique d’élaboration du corps social, qui n’œuvre plus à la perpétuation d’un ordre traditionnel hérité du passé mais qui se projette vers l’avenir en cherchant à réaliser toutes les potentialités du progrès, considéré comme bénéfique par essence.

Marcel Gauchet a longuement étudié les causes et symptômes de la crise actuelle des démocraties, qu’il considère être une crise de croissance. La démocratie est un mode de gouvernance fondamentalement instable car ses trois principes fondateurs sont potentiellement antagonistes, puisque chacun peut prétendre seul à réguler et définir la forme de la société. Actuellement, même s’il y a eu approfondissement simultané de ces trois principes, le droit des individus l’emporte dans le monde occidental et tend à devenir le pilier principal de la société, nous empêchant de concilier harmonieusement les exigences des libertés individuelles avec les nécessités de l’autoproduction du futur et avec les impératifs de la gouvernance politiques. Faute de pouvoir se projeter sur des bases stables au-delà de l’horizon du présent immédiat, les gouvernants gèrent mais ne dirigent plus la société. En fait, ainsi que l’a montré Julien Syrac dans son long essai-manifeste « Déshumanité » paru en 2021 au cœur de la crise du covid, tout se passe comme si, dans le monde occidental, les principes mêmes de la démocratie, qui ont permis le triomphe de son modèle universaliste, sapaient ses propres fondations et la menaçaient d’autodestruction en érodant toutes les valeurs communautaires au nom de valeurs individuelles qui créent l’émergence d’un paradoxal « individualisme de masse » et qui réduisent la gouvernance de l’Etat à la production du Droit pour organiser et gérer les échanges entre individus, qui dessinent un réseau de liens transactionnels de plus en plus subtils et complexes. Ainsi, au fur et à mesure que la société s’atomise, le citoyen cesse progressivement de se définir comme tel : il clame son individualité, revendique sa singularité et s’affirme contre les autres individus en considérant que le rôle de l’Etat démocratique est de favoriser l’expression de ses droits et prérogatives individuelles, qui deviennent des finalités, renforçant l’individualisme ou provoquant l’émergence de solidarités identitaires.

Cette conception de l’Etat alimente le clientélisme politique en transformant les enjeux de représentation en mécanismes de marketing électoral. Je le subodorais déjà à la seule écoute des interventions médiatiques de nos élus, chefs de parti et membres du gouvernement mais le sondage pour lequel je fus sollicité a achevé de me convaincre que les stratégies électorales, élaborées au sein des partis ou de « think-tank » plus ou moins lobbyistes, ont épousé les méthodes de ventes commerciales et sont évaluées en termes de popularité auprès d’électeurs considérés comme des consommateurs à séduire. Les partis politiques s’adressent donc désormais à des pans de la population, comme une société étudie des panels de clientèle à cibler en fonction de leurs attentes et sensibilités, et non plus à la société dans son ensemble, provoquant la déliquescence des notions de « bien commun », de « service général », etc. qui sont certes encore évoquées, le plus souvent en guise d’alibis masquant la défense d’intérêts particuliers, mais ne sont plus véritablement défendues et incarnées.

Comme tout système politique, la démocratie repose sur des hommes. Même si ses principes l’ont érigée au-dessus de tous les autres systèmes de gouvernement, la démocratie reste faillible par les hommes qui l’incarnent et la mettent en oeuvre. Je suis souvent irrité par les déclarations intempestives de journalistes ou d’hommes politiques déclarant, alors qu’il s’agit de la même volonté de puissance, que les outrances verbales de Donald Trump ou d’Elon Musk ne peuvent se comparer à celles de Vladimir Poutine, sous prétexte que les USA sont une grande démocratie et que Donald Trump a la légitimité d’un chef d’Etat démocratiquement élu. Et alors ? Adolf Hitler a lui aussi été porté au pouvoir par des élections qui ont permis au parti national-socialiste (NSDAP) de bloquer le fonctionnement des institution et d’imposer à Hindenburg, qui n’en voulait pourtant à aucun prix, de nommer Hitler au poste de chancelier… En fait, la démocratie n’est pas, par elle-même, suffisante pour garantir une gouvernance répondant aux exigences éthiques d’un pouvoir juste, efficace et capable d’affronter les défis actuels et futurs, car :
• s’il existe des vérités et des principes absolus, alors un homme seul peut avoir raison contre une multitude et le principe de majorité qui régit le fonctionnement des institutions peut être mis en défaut, comme le démontra ironiquement Umberto Eco en imaginant une publicité vantant les mérites de la bouse : "Mangez de la merde, des millions de mouches ne peuvent pas se tromper".
• le principe électoral, transformant l’élection à venir comme un horizon de court terme, incite à une forme malsaine d’attentisme, d’aveuglement et même de lâcheté. Si j’ai bonne mémoire, Al Gore, qui fut pourtant le vice-président de Bill Clinton, souligna, lors de son discours de réception du prix Nobel de la paix en 2007, la fâcheuse indécision qui caractérise tous les leaders politiques, et leur propension à fermer les yeux sur les problèmes de long terme et à repousser les décisions difficiles de peur de fâcher leur électorat ;
• la démocratie représentative repose sur la qualité humaine et l’engagement des personnes qui se présentent au suffrage or il y a bien trop d’hommes et femmes politiques mus par un appétit de pouvoir et non par le souci du bien commun. Il suffit de quelques rencontres pour constater que la plupart des hommes et femmes politiques sont des personnes aux facultés assez ordinaires, qui ne se distinguent du commun des mortels (leurs électeurs…) que par une ambition démesurée et un talent rhétorique savamment travaillé (à tel point qu’il est difficile, en lisant Platon ou Aristote, de ne pas voir dans la démocratie actuelle le triomphe des sophistes, et de l’habileté à plaire et convaincre par l’éloquence au détriment de l’exigence de vérité de parole). La politique s’est progressivement professionnalisée, devenant un secteur d’activité accaparé par des partis fonctionnant comme des entreprises de communication au service de projets et de plans de carrière personnels.
• le pouvoir, même démocratiquement issu des urnes, est corrupteur. Il octroie, à celui qui le détient, un enivrant sentiment d’incarnation (comme si, par la transsubstantiation de l’élection, l’élu devenait l’émanation de l’ensemble de la société qui projetterait à l’extérieur d’elle-même la sublimation de son « moi » idéal) et de puissance (par le pouvoir de façonner la société et de marquer l’Histoire). Tous les hommes politiques, à quelques rares exceptions, présentent au fil de leurs mandats successifs une accoutumance malsaine au pouvoir, qui flatte leur ego et leur procure prestige et avantages matériels. C’est d’ailleurs l’une des causes du désamour paradoxal des électeurs envers les dirigeants qu’ils ont eux-mêmes élus : comme l’avait déjà compris et dévoilé La Boétie, les hommes produisent leur soumission au Pouvoir mais ne la désirent pas et ne cessent donc de protester contre la tutelle de ceux qui l’incarnent. Il est pour moi très significatif que les deux personnalités politiques les plus populaires de la 5ème République, sur leurs socles électoraux respectifs, soient deux hommes totalement étrangers au sérail des politiciens de carrière et insensibles – du fait de leurs valeurs personnelles – à « l’addiction » et à « l’ivresse » du pouvoir » : Charles de Gaulle (un militaire, dont toutes les personnalités politiques actuelles revendiquent une part d’héritage, quand ce n’est une filiation spirituelle), et Aimé Césaire, un poète (dont la popularité impressionna si fortement Milan Kundera lors de son séjour en Martinique qu’il écrivit, dans « Rideau » :Je ne verrai certainement plus jamais un tel contact intime, charnel, entre le peuple et celui qui le représente. Le poète comme fondateur d’une culture, d’une nation, cela, je l’ai très bien connu dans mon Europe centrale (…) il ne leur avait pas été donné de connaître ce qu’a connu Césaire : l’amour ouvertement déclaré des siens).

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